Rencontré lors de l’exposition de Coincy, David ZARO et moi avons pu échanger longuement.
Ce mois-ci, nous allons découvrir David ZARO plus en détail.
Je m’appelle David ZARO, j’ai 52 ans et vis à GIVRAUVAL dans la Meuse (55) dont je suis originaire. Je travaille dans l’Éducation Nationale depuis maintenant plus de 30 ans où je suis Conseiller Principal d’Éducation. Dans le cadre de mes activités professionnelles j’encadre un groupe d’élèves dans l’animation d’une webradio et d’une webtv.
J’interviens également avec les élèves de l’option théâtre dans le cadre de la création visuelle, qui constitue l’un des éléments de la scénographie de la restitution de fin d’année. Je partage mon temps libre entre mes deux passions, la photographie et la course à pied
J’ai débuté la photographie avec mon père il y a plus de 35 ans à la lueur d’une ampoule inactinique. Collectionneur invétéré d’anciens appareils photo, il m’a transmis le virus dès mes premiers pas dans le labo. Au fil du temps cette passion n’a fait que croître, ce qui m’a conduit ensuite à passer un CAP photographe et un BEP audiovisuel. Il m’aura fallu attendre plus de deux décennies avant que je franchisse le pas de présenter mon travail dans le cadre d’expositions (la première date de 2017), puis de me lancer dans la réalisation de mon premier livre photo quelques années plus tard en 2018.
Force est de constater que si je suis actuellement un féru de photographie de rue, j’ai cependant mis beaucoup de temps avant d’avoir la capacité de photographier un être humain. En dehors des traditionnelles photos de famille, cela était inconcevable pour moi ! Même si j’étais un grand admirateur du travail de RONIS, DOISNEAU, BRASSAÏ et tous les autres « classiques », j’avais comme un blocage. Je me sentais illégitime de m’essayer à ce style photographique. J’en avais pourtant exploré un certain nombre auparavant, paysage, photo animalière, macrophotographie, architecture, urbex… mais celui-ci me semblait inaccessible. Et puis un jour, lors d’un voyage au PAYS-BAS, j’ai eu un véritable déclic. Il y avait là-bas une effervescence qui m’a immédiatement plu et que je n’ai pas pu m’empêcher de photographier. Des rues pleines de couleurs, d’odeurs, de vie… Clic par ci… Clic par là… le processus était lancé !
Je pourrai en parler durant des heures, mais j’aime la photographie qui s’intéresse aux gens, la photographie humaniste du milieu du XXème siècle a été à ce titre une véritable révélation pour moi.
À travers mon travail, je veux inviter les spectateurs à s’arrêter et à prendre le temps d’observer. De la banalité il peut parfois se dégager des choses incroyables pour celui ou celle qui sait prendre le temps d’observer. Mes clichés sont une invitation à la contemplation. J’aime lorsqu’ils font naître une réflexion. Réflexion sur le monde et la place que l’on y occupe. Sans être moralistes ou nécessairement engagées, j’aime que l’on questionne mes photos et qu’ensuite le spectateur se questionne sur lui-même. Que voit-il ? Comment interprète-t-il ce qu’il voit ? Quelle sensibilité, ou plutôt, quelle émotion nait en lui en voyant mon travail ?
Au fil du temps j’ai beaucoup changé de matériel notamment au moment de mon passage de l’argentique au numérique. J’ai débuté l’argentique avec un Canon AE1, que j’ai toujours, avant de passer à l’autofocus avec le premier Canon EOS, le 620. J’ai également beaucoup travaillé en 6 x 6 avec le Rolleiflex, que malheureusement je n’ai plus et que mon père me prêtait.
Passé au numérique en 2010 avec un Canon EOS 10D, j’ai ensuite changé régulièrement de boîtier en restant chez Canon afin de conserver mon parc d’objectifs. Parmi les boîtiers que j’ai le plus utilisé et conservés, figurent les Canon 7D MKII, 1D MK III et 5D MK III. Ces trois boîtiers me permettent de travailler avec 3 formats de capteurs différents (APS-C, APS-H et FULL FRAME).
Récemment j’ai opéré deux grands changements dans mon matériel, à savoir le remplacement de mes objectifs Canon par des Sigma 1.4 plus lumineux et qui me permettent de retourner aux sources en travaillant avec des focales fixes (j’adore ça). Autre grand bouleversement, après plus de 30 ans passés chez Canon, j’ai acheté mon premier Nikon, un Zfc il y a peu de temps. Beaucoup plus pratique pour faire de la photo de rue, mes cervicales depuis me disent merci, car un 24-70 2.8 monté sur une EOS 1D MK III ça n’est pas ce qu’il y a de plus discret et de plus facile à manipuler.
À côté de cela, je caresse toujours le rêve de m’équiper en LEICA avec le Q3 qui me fait sérieusement de l’œil… mais pour lequel je suis loin d’avoir le budget.
Après une période de calme durant laquelle j’avais mis mes activités photo de côté au profit de la course à pied, l’an passé je me suis relancé dans les expositions et les festivals et ai déjà inscrits dans mon agenda des dates pour 2026. D’autres propositions me parviennent encore à cette heure. Cependant, mon projet principal demeure mon deuxième livre sur lequel je suis en train de travailler et qui sera consacré à mon travail de photo de rue. Comme le précédent je souhaite le sortir en autoédition afin de rester maître de son contenu.
Voilà incontestablement la question à laquelle il m’est le plus difficile de répondre tant j’admire le travail de dizaines de photographes. « Choisir c’est renoncer » ! Étant un fervent défenseur de la parité, je vous livre ma sélection de quatre photographes, deux femmes et deux hommes, aux univers différents dont je me suis souvent inspiré.
La première, Vivian MAIER qui travaillait au Rolleiflex et dont l’incroyable œuvre photographique n’a été découverte (par hasard) qu’après sa mort. Photographe introvertie, son œil a su capturer la société américaine des années 50-60 avec une simplicité et un réalisme déconcertants. Dans ses clichés tout est sa place et en harmonie. Sa gloire posthume n’est que le reflet de l’incroyable talent qu’elle a cultivé dans l’anonymat le plus complet durant ses années qu’elle a consacré à son travail de gouvernante.
La seconde, Lee MILLER, elle aussi Rolleiflex autour du cou dont l’opiniâtreté est admirable. Une artiste qui en déclarant : « Je préfère faire une photo que d’en être une » se fait l’écho du parcours hors du commun qu’elle a traversé. Bien qu’ayant appris la photographie avec Man Ray (qui lui doit la redécouverte de la « solarisation » à la suite d’un incident de labo), elle a très rapidement développé son identité visuelle. Du mannequinat aux clichés des camps de DACHAU et BUCHENVAL, elle a tout connu ! Ses photographies sont de véritables uppercuts et le reflet de son âme torturée.
Le troisième, Raymond DEPARDON. La porte d’entrée de la découverte de son travail a été pour moi son ouvrage « La France de Raymond DEPARDON ». Véritable odyssée photographique à travers la France, ce livre est pour moi une bible. Il montre la vie des gens, sans les gens. Et pourtant il raconte tant d’eux. J’admire le regard que cet homme porte sur le monde immédiat qui l’entoure. Plus tard, j’ai découvert ses photos réalisées en Algérie durant les années 60 qui montre parfaitement ces deux communautés qui cohabitent sans véritablement vivre ensemble. Raymond DEPARDON a un sens du cadre dont je me suis inspiré à de nombreuses reprises.
Le quatrième et dernier, dans un style différent du précédent Martin PARR. Artiste hors-normes et véritable électron libre dont les couleurs pop et la vision décalée de la société me régalent. Ses clichés sont incroyables ! Derrière la drôlerie qui souvent les caractérisent, ils sont d’une force incroyable et racontent beaucoup du désœuvrement des classes populaires britanniques depuis des décennies. Sans sombrer dans le pathos il montre de façon acerbe les errances et les excès de notre société.
Un premier : « Familiarisez-vous rapidement avec toutes les règles photographiques, pour au plus vite les contourner et laisser libre court à votre créativité et à l’émotion ! »
Un second : « Documentez-vous ! Plongez-vous dans les livres, partagez avec vos amis, allez voir des expos ! Cela nourri la réflexion et forge le regard ».
La technique photographique n’est qu’un outil. Il y a prendre des photos et faire de la photo. Ce sont à mes yeux deux activités radicalement différentes. Faire de la photo, c’est choisir un point de vue et ainsi s’inscrire dans une véritable démarche. C’est élaborer une réflexion, construire et organiser son travail pour accéder pleinement à l’écriture photographique. Avec un style, un univers graphique. C’est exprimer qui on est et ce que l’on ressent à travers ses clichés. Il n’y a pas, ou peu de hasard, car on aiguise son regard au fil du temps et des rencontres avec d’autres photographes. Le partage et l’échange sont précieux, raison pour laquelle les clubs et associations photo sont sources d’émulation et de questionnements importants qui permettent de se forger une culture photographique et ainsi développer sa propre identité artistique.
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