Questions à ....

Lucie Hodiesne Darras

Rencontré au Salon de la Photo de Paris en 2023, j’ai échangé avec elle sans acheter son livre, que je trouvais trop personnel.

Puis, en 2024, je suis retombé sur cet ouvrage, un livre intime sur son frère. Et finalement, il a trouvé sa place dans ma bibliothèque.

Ce mois-ci, nous allons découvrir Lucie Hodiesne Darras.

1- Peux-tu te présenter rapidement ?

Bonjour, je m’appelle Lucie Hodiesne Darras et je suis photographe auteure. Je suis diplômée de l’École des Gobelins, en cursus photo & Vidéo. J’ai, dans mon travail, plutôt une approche documentaire et axée sur l’être humain. Je cherche très souvent à mettre en lumière la singularité de chacun, et surtout chez les personnes que l’on aurait pas tendance à voir dans notre société.

2- Depuis quand fais-tu de la photo ?et comment as-tu commencé ?

Je suis passionnée de photographie depuis ma plus tendre enfance. J’ai grandi dans cet univers là, puisque mon père collectionne les appareils photos argentiques, appareils d’espionnage, chambres noires, appareils photos aérien. J’ai aussi regardé beaucoup de films, ce qui tout de suite a nourri mon regard, sur la composition des plans, la manière dont une image pouvait raconter quelque chose. J’ai commencé à faire de la photographie à l’âge de six ans, d’abord avec des appareils jetables, puis en piquant les petits compacts de mes parents avant d’avoir le mien à l’âge de 10 ans. Dans un premier temps, c’était pour cristalliser certains de mes souvenirs.

C’est à partir du lycée que j’ai commencé à expérimenter certains portraits, certaines mises en scène, en demandant à mes amis d’être mes modèles, en apportant du stylisme. Je faisais aussi beaucoup d’autoportraits, ce qui ne m’a jamais quitté après. Car on apprend aussi à  s’apprivoiser, à s’accepter en se mettant soi-même de l’autre côté de l’objectif.

3- Comment décris-tu ton style de photos ?

Je dirais que mon approche est en tout premier humaniste. Chercher à traduire une certaine vérité des émotions, tout comme les  trajectoires de personnes invisibilisées dans notre société. J’ai grandi avec les photographies de Diane Arbus, Robert Doisneau, Sebastiao Salgado ou encore Henri Cartier-Bresson donc ces inspirations font parties de mon ADN de photographe.

4- Argentique ou numérique ? Quel(s) boitier(s) ?

Je travaille avec les deux techniques.
Je crois déjà que ce qui me plaît dans la photographie argentique, c’est sa magie, dans le sens où on découvre son image une deuxième fois. La première fois, c’est l’instant décisif de Henri Cartier-Bresson, le moment où il y a une vibration entre le cœur et le regard quand on a la sensation de tenir quelque chose. Puis l’imagination fait son travail jusqu’au moment du développement et enfin quand la pellicule est développée et scannée, on redécouvre ses clichés avec les yeux d’un enfant. Il y a aussi ce rendu incomparable, les petites pétouilles qui s’installent de part et d’autre, la matière de l’image qui est palpable et qui finalement donne plus de caractère à une image. Ce rendu je l’ai trouvé dans l’argentique avec mon Nikon FG et des pellicules 35 mm.

Je travaille beaucoup aussi dans mes reportages/documentaires avec mon hybride Nikon Z-FC et mon compact Leica D-Lux 7. Pour mes reportages, il me faut des boitiers polyvalents, mais qui ne soient pas trop imposants, impressionnants pour les sujets que je photographie. Pour avoir un regard juste et garder l’authenticité d’un moment, je cherche une connexion réelle avec mon sujet, ou dans le cas contraire, me rendre pleinement invisible pour qu’on ne soit pas influencé par la présence de l’appareil photo, et ainsi exprimer un instant avec justesse.

Sinon, je réalise beaucoup d’expérimentations avec des disques à sténopé, un objectif Makinon catadioptrique ou encore un objectif Lensbaby que je mets sur mon reflex Nikon D7200, et qui donnent des rendus picturaux, organiques, ou abstraits.

5- Quels sont tes projets en cours ou futurs ?

En ce moment, je commence à réaliser des ateliers photos pour des jeunes aidants ( frères et soeurs de personnes en situation d’handicap ) pour leur proposer un moment rien qu’à eux, en dehors de la sphère familiale, scolaire, et leur permettre d’exprimer des choses par le prisme de l’art, là où parfois il est plus difficile de mettre des mots. J’ai eu ce même besoin lorsque j’étais plus jeune. L’art a été un refuge, alors aujourd’hui, j’ai envie de transmettre à mon tour, et de partager.
Aussi, en 2025, je vais travailler sur l’importance de créer des aires de jeux inclusives. Depuis notre plus jeune âge, le jeu est un pilier plus que nécessaire dans la construction d’un être humain, puisqu’il favorise le vivre-ensemble, les liens sociaux, la diversité, l’inclusion, la tolérance.

Les aires de jeux classiques ne conviennent pas aux personnes handicapées. Ce manque d’adaptabilité pour ces enfants renforce ce sentiment d’exclusion avec les autres personnes de leur âge. Et de l’autre côté, pour les autres enfants, cela crée un manque d’informations, de connaissances, ce qui peut souvent conduire à de l’ignorance, indifférence, voire intolérance.

Enfin, un reportage sur la Petite Enfance sera réalisé afin de mettre en lumière les différents métiers qui gravitent autour de cette thématique. De montrer le quotidien de ces figures de l’ombre et du lien qui les unissent aux enfants dont elles s’occupent.

6- Un.e photographe coup de cœur

Il y a beaucoup de photographes dont j’apprécie le regard, la sensibilité. Je suis très admirative du travail de certains de mes confrères/consoeurs, avec qui je passe du temps. C’est très dur de choisir un.e seul.e photographe !

7- Un petit conseil à donner à toute personne qui aimerait se lancer dans la photo ?

Si je devais donner un petit conseil à toute personne qui aimerait se lancer dans la photo, je lui dirais de suivre son coeur, et de ne pas tenir compte de ce que pensent les autres. Il y a beaucoup de personnes pour qui la photographie est juste un loisir et non un travail. On me demande souvent de manière inquiète si je gagne bien ma vie. Ça a le don de m’agacer. Il peut y avoir des challenges, certes, mais se lever le matin avec le sourire parce qu’on vit de sa passion, de sa vocation, et avec l’envie de poursuivre ses rêves, ça vaut tout l’or du monde. Donc si c’est vraiment quelque chose qui nous transcende, nous anime, nous rend vivants, on fonce.

En savoir + sur la photographe Lucie Hodiesne Darras

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